Discours Lieutenant Colonel Guy Dubois 29-05-10  
 
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Discours du Lieutenant Colonel (h) Guy Dubois

29 mai 2010


« Il aura fallu 70 ans pour que l’on daigne rendre justice aux soldats de 1940. S’il est vrai que l’on ne commémore pas une défaite, nous ne devons pas oublier pour autant l’abnégation de ces hommes dont nombre d’entre eux se sont battus jusqu’au sacrifice suprême.

Tout a été dit sur cette défaite cinglante que certains historiens français ont vite qualifiée de déroute.

Ce long silence qui a suivi cette bataille de France témoigne d’une certaine gêne, comme si l’on avait honte de ce passage de l’histoire.

Cependant Il est bon de rappeler que nos soldats résistèrent héroïquement.

Malgré les erreurs stratégiques du Haut Commandement et de l’état major,  ils n’ont pas démérité dans les combats meurtriers qu’ils livrèrent à une armée allemande fanatisée et bien initiée à la guerre moderne, lui infligeant de lourdes pertes tant en matériel qu’en soldats.

Le bilan est là pour l’attester : en 45 jours, 553 000 soldats sont tués ou blessés dans les deux camps, dont 342 000 Français. Pour la France, 100 000 soldats sont morts au champ d’honneur, pour l’Allemagne, 50 000. Les pertes quotidiennes allemandes y sont supérieures à celles de la campagne de Russie de 1941. Il faut savoir que la première bataille de chars s’est soldée par une victoire française, 1100 chars allemands sont détruits ou endommagés sur les 3000 engagés. De même que pour l’aviation, sur les 4000 avions allemands engagés, 1400  sont mis hors de combat 

Dès le 15 mai nos unités d’élite dont la première armée commandée par le général Blanchard et la septième armée par le général Giraud sont engagées en Belgique où elles vont supporter le gros de la bataille après l’effondrement des armées belges et Néerlandaises. La percée fulgurante des allemands désorganise complètement notre Armée. La confusion la plus totale règne dans les états majors coupés, pour la plupart, de leurs troupes.

Les unités de base, livrées à elles mêmes se battent et résistent héroïquement dans un contexte inextricable

Seuls l’honneur et le patriotisme animent ces combattants pétris de bravoure, ne se résignant que lorsqu’il n’ont plus de munitions.

Ces luttes acharnées et inégales ensanglantent notre région

Les combats engagés ici les 22 et 23 mai par le dépôt mobile de remonte de la première armée et le 9ème bataillon de chars de la septième armée en sont l’ illustration.

Je passerai sur l’épopée tragique de ces deux formations qui a été largement développée ici le 24 mai 2008 pour ne m’en tenir qu’à l’affrontement qui les a opposés aux Waffen-SS.

Le dépôt mobile de remonte, soit 300 hommes tous grades confondus et 450 chevaux commandés par le Capitaine Robert de Lencquesaing est cantonné dans notre village. Depuis le 20 mai

Le Capitaine Delbende qui commande l’hôpital vétérinaire attaché au dépôt de remonte a, quant à lui, établi son cantonnement à Norrent Fontes.

La situation est de plus en plus tendue. La logistique et l’intendance ne suivent plus. Il n’y a plus d’avions alliés dans le ciel. Seuls les stukas survolent la région en basse altitude. Il n’y pas non plus de liaison radio, le seul moyen de communication avec l’état major reste l’estaffette.

Le 21 mai , le Général Weygan se pose sur le terrain d’aviation de Rely pour une inspection. Il y trouvera un terrain désert, les escadrons livrant bataille en Belgique. La visite sera de courte durée, le général étant averti par le capitaine Delbende de la présence des allemands dans les parages.

Le 22 au matin le Capitaine de Lencquesaing apprend par les réfugiés qui rebroussent chemin qu’une colonne motorisée allemande importante circule sur chaussée Brunehaut entre Arras et Thérouane. Informé, son état major ne réagit pas.

Le capitaine met alors en place des barrages de fortune aux entrées du village ; mais il doit se rendre à l’évidence. Il a beau avoir 300 hommes sous son commandement, il ne possède que cinquante fusils mousquetons

A 17h30 les allemands se présentent devant les barrages. Ils sont pourvus d’armes automatiques et de petits canons. Le combat s’engage. Des hommes tombent de chaque côté Les armes lourdes entrent en action, le rapport de force est inégal et les munitions font défaut. Les combattants dont le capitaine sont capturés les armes à la main. Le reste du détachement n’ayant aucun moyen de défense sera fait prisonnier.

Le Capitaine Delbende de retour d’une liaison avec l’état major traverse le village en pleine bataille. Il est abattu alors qu’il tentait de s’échapper, refusant de se rendre. Le Capitaine Delbende, officier de réserve mobilisé, originaire d’Aire sur la Lys était chevalier de la légion d’honneur et décoré de la croix de guerre 1914-1918.

Les Waffen-SS prennent possession du village. Apprenant qu’une colonne de blindés circulait sur l’axe Béthune Saint Omer, ils évacuent rapidement les prisonniers et s’organisent en embuscade... Des canons antichars se positionnent sur la route nationale dont certains dans des soupiraux de cave.

Le 23 mai le 9ème bataillon de chars de combat de la 7ème Armée qui a beaucoup souffert en Belgique, quitte Béthune et se scinde en deux: la 2ème compagnie prend la direction de St Venant Robecq. La 1ère et la 3ème compagnie empruntent la RN43 en direction d’Aire sur la Lys.

La progression se fait dans des conditions sordides au milieu des réfugiés qui se croisent et sous une chaleur torride. Certains chars en panne d’essence ou simplement en panne sont pris en remorque ralentissant une partie du détachement... La partie la plus mobile traverse le village sans encombre. La seconde partie soit neuf chars et son matériel d’accompagnement tombent dans l’embuscade. Un combat violent s’engage. Nos chars prennent le dessus allant jusqu’à faire une dizaine de prisonniers mais rapidement la tendance s’inverse, les munitions font défaut. Les waffen SS reprennent l’avantage. Nos chars sont détruits. Un équipage mourra carbonisé. Le combat se poursuit au corps à corps avec les armes récupérées sur les morts et sur les blessés, mais là aussi la lutte est inégale.

Le bilan de ces deux journées de combat est de 16 tués dans nos rangs dont un officier, 6 sous officiers, 10 soldats et 36 allemands tous grades confondus.

Dans quelques instants nous allons rendre hommage à ces héros qui ont donné leur vie pour préserver nos libertés.

Monsieur le Maire, le comité des anciens combattants que je représente vous remercie pour cette belle réalisation qui s’inscrit dans notre devoir de mémoire et dont vous pouvez être fier. Cette vitrine du passé ne sera pas sans attirer l’attention et interpeller vos administrés.

De votre aveu, les gens de votre génération et de celles qui suivent sauront à présent ce qui s’est passé dans leur village, les 22 et 23 mai 1940. »

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