Le terrain d'aviation militaire par E. Pecqueur  
 
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Le terrain d’aviation militaire de Norrent-Fontes - Rely

du 15 août 1937 au 22 mai 1940

 

par Emile Pecqueur

 

Introduction

 

Quand je me suis décidé à écrire mes chroniques de mémoires, je ne me doutais absolument pas que j’allais « récupérer » tant de faits anciens et intéressants… alors poursuivons et prenons la direction Auchy au Bois – Rely pour essayer de faire revivre un terrain d’aviation militaire du 15 août 1937 au 21 mai 1940, dénommé opérationnellement « Terrain de Norrent-Fontes…. Rely ».

 

Arrêtons nous un instant sur le chemin départemental n°94 plus connu sous l’appellation « Route d’Hesdin » au lieu-dit « Vert-Dragon » à Auchy au Bois, face encore à ce jour, à des vestiges se rapportant à cette base.

Nous sommes ainsi face au terrain d’aviation en cause.

 

Ce terrain au départ a été appelé communément Terrain de Rely alors qu’au point de vue opérationnel, il était dénommé « Terrain de Norrent-Fontes – Rely », ceci expliqué seulement dans les documents officiels que j’ai pu consulter, par cette unique phrase « Norrent-Fontes est connu et représenté comme chef-lieu de canton ». Ce terrain d’aviation a pour point de départ le 15 août 1937, un décret qui décide l’expropriation de 82 hectares 70 ares 99 centiares de bonnes terres cultivables pour aménager la base, soit 53 hectares 30 ares 63 centiares du territoire de cette commune et 29 hectares 40 ares 50 centiares de celle de Saint Hilaire-Cottes.

C’est à cette même époque que l’état se décide d’ouvrir deux grands chantiers dans notre village.

 

A – Redressement ou déviation de la Nationale 43 entre la sortie de Norrent-Fontes et Bourecq « Le Plantin ». Compte tenu des futurs événements, il faudra attendre dix années pour voir cette déviation mise en service.

 

B – Aménagement de la Route nationale n° 341 appelée aussi itinéraire international Calais- Vitry le François ou plus simplement Chaussée Brunehaut entre Estrée-Blanche et Pernes en Artois.

L’ordonnance du 10 août 1937 rendue par le Président du Tribunal civil de Béthune ordonne l’expropriation et la mise à disposition immédiate des terrains situés dans les communes d’Estrée-Blanche, Rely, Ligny les Aire, Saint Hilaire-Cottes, Auchy au Bois, Amettes et Ames afin de permettre la réalisation du projet. Cette étude de modification du tracé entraine la création de servitudes de visibilité à tous les carrefours existant sur l’itinéraire.

 

Pour ce qui nous concerne, la zone du Vert-Dragon est visée ; il convient d’y aménager un plan de dégagement suffisant au croisement de la route d’Hesdin et de la Chaussée Brunehaut. A cette occasion, le vieux café qui se trouvait juste dans l’angle de ces deux voies devait être abattu (voir coupure de presse jointe avec photo d’époque). L’endroit constitué d’une maison à usage de cabaret avec grange et étables, le tout érigé sur trois ares de terrain fut mis en vente par les propriétaires d’alors Mr et Mme Dumoulin-Delvart acquis le 19 février 1938 par Mme veuve Vermeesch-Hurtrel, marchande-brasseur de Bourecq pour la somme de 3 000 francs.

Un nouveau café s’édifia alors une cinquantaine de mètres en arrière pour dégager la vue ; il existe toujours sous la vraie enseigne « Le Vert-Dragon ».

 

Au cours de la période  novembre 1939 – mai 1940, quelques aménagements se rapportant à l’installation de l’aérodrome militaire ont été réalisés ; entre autres le poste de commandement de l’Escadrille prévue prend son quartier à la Brasserie Lombard à Auchy au Bois près du Vert-Dragon et le mess des officiers s’installe près de la fosse de Ligny les Aire.

 

Après les Français…. Un baraquement en bois dissimulé derrière le café du Vert-Dragon, « Le foyer du soldat » occupé par les Allemands, est devenu le « soldatenheim » : il servait de lieu de détente pour les soldats de la base.

 

Avant d’aller plus loin dans l’installation de Rely, je vais citer « ad litteram » la présentation de l’aviation militaire dans le Nord de la France en 1939-1940 par le capitaine Myrone Cuich, historien de l’aéronautique.

« « ….A la veille de la guerre, l’aviation militaire ne compte qu’une unité hybride dans la région du Nord de la France, la G.A.O 501 créé en 1933 sur le terrain de Flers les Lille, aujourd’hui Villeneuve d’Ascq. G.A.O Groupe aérien d’observation » ».

 

Les travaux des nouvelles bases débutent en 1937. Le terrain de Flers devenant trop étroit, l’Etat Major transfère le G.A.O début 1939 sur le terrain de Lesquin. Après réquisition et expropriations de terres, le nouvel aérodrome militaire s’étend sur 110 hectares. Seul le nivellement est réalisé en 1939-1940,  pas d’installations ni de pistes.

Il en est de même dans la plupart des autres bases prévues dès 1936 : Merville-Lille-Norrent-Fontes-Wizernes- Vitry en Artois- Cambrai et Epinay.

 

Le 10 mai, la Luftwaffe attaque tous les aérodromes militaires français de la région du Nord. Les opérations commencent réellement le 13 mai. Trois jours plus tard, le G.A.O 501 commence son repli sur Roye. Il participe à la bataille de la Somme. Le groupe de chasse 1/4 équipé d’avions modernes 26 Curtiss 475 quitte Wez-Thuisy (Marne) en novembre pour Norrent-Fontes – Rely près d’Aire sur la Lys où il n’y a que deux hangars.

Affecté aux forces aériennes de la 7ème armée avec un secteur limité : Dunkerque- Saint Omer – Armentières, il effectue sa première patrouille le 22 novembre. Les lieutenants Hurchauer et Weiss abattent un Heinkel III. Ils recevront la Croix de Guerre avec palmes.

Le groupe déploie des activités intenses et récolte de nombreuses victoires. Après des replis successifs, le Groupe part pour l’Afrique du Nord.

Il a terminé la Campagne de France avec 46 victoires, 10 tués, 12 blessés.

 

Le Groupe de Chasse 3/1 venu de l’Est s’installe début mai à Norrent-Fontes - Rely. Equipé de 28 Moranes 406, il participe à la couverture aérienne de la 7ème armée du Général Giraut et à celle de Dunkerque. Le 10 mai à 4h du matin, l’ennemi arrose le terrain de bombes. Quelques Moranes sont détruits. Immédiatement, les patrouilleurs d’alerte rattrapent les bombardiers ; cinq sont abattus sur la plage, deux près d’Hazebrouck, les autres en Belgique. Le soir, le Groupe a rejoint Morbeck au Nord de Gand et le 13 mai nouveau repli sur Norrent-Fontes – Rely. Le Groupe participe à la défense de Creil et opère dans la région de Maubeuge et de Guise.

A sa dissolution, le 25 juin à Marignane, il totalise 35 victoires 8 tués 10 blessés.

 

Le 17 mai à 9h30, le Commandant Geille reçut de l’Etat-Major par téléphone un ordre laconique « Foutez le camp…. Ils sont là… ». Le Commandant Geille a été le créateur des troupes aéroportées.

La situation sur le plan militaire n’a cessé de se dégrader. Le 20 mai, au soir, les Allemands ont atteint Abbeville. La 2ème Division Blindée du Général Guderlan a parcouru plus de cent kilomètres en une journée. C’est fini, des millions d’hommes sont pris au piège. Le plan élaboré par Hitler et le Général Von Manstein « le coup de faux » a réussi. Mais le chef d’état allemand craint une réaction des alliés…. Il se souvient de 1914. Plus une armée s’éloigne de ses bases, plus elle est fragile. C’est d’ailleurs ce que pense le nouveau généralissime Weygand ; il imagine une contre-attaque à partir d’Arras et de Cambrai qui couperaient les avants- gardes ennemies du gros de leurs forces.

 

Le 20, à Lens, les généraux britanniques Ironside et Pownal en discutent avec le Général Billotte Chef de la Première Armée. Le projet est possible, Weygand décide de le mettre au point avec les Anglais et les Belges.

« Attaquez vers le Sud… Demain, dit-il à Paul Reynaud, je me rends sur le front. Je veux voir ce qui s’y passe ! … Vous ne pensez pas ce que vous dites…. C’est trop dangereux !!! Si c’est pour rester dans un fort comme Gamelin.. Ce n’est pas la peine… »

Le déplacement prévu par chemin de fer est annulé. Weygand va partir secrètement en avion  du Bourget… à bord d’un prototype armé d’un canon… en bois... Avant le décollage, Weygand déploie ses cartes.

 

« Depuis 24 heures, je ne peux rien savoir de précis sur la situation de nos troupes surtout dans le Nord vers la frontière belge. Les renseignements sont contradictoires. Il faut que nous y allions nous-mêmes. Ensuite, je rencontrerai le roi des Belges et le Général en chef des forces britanniques. Nous ferons cette double mission ce matin en allant à Saint Inglevert par le chemin des écoliers dit-il au Commandant de l’Escadrille Veniel. D’abord cap sur Abbeville. Nous survolons la vallée de la Somme jusqu’au Crotoy. Je crains qu’il n’y ait des infiltrations de ce côté. Puis cap sur Cambrai ou Valenciennes. On se posera à Norrent-Fontes – Rely après avoir examiné la zone Lens-Béthune. J’espère que vous avez fait le nécessaire pour le ravitaillement ? Oui, j’ai fait téléphoner au Q.G. pendant que nous discutions. Un groupe d’observation est basé à Norrent-Fontes. Réponse de Daurat responsable des transports aériens du Grand Quartier Général… et d’ajouter... il vous y attend et tout sera prêt pour le ravitaillement. »

 

Le Général aura sur place, tout à l’heure, un aperçu de l’état de désorganisation de notre armée. Au moment de prendre place dans l’appareil, il ajoute : « Pourvu dit-il avec le sourire qu’ils prévoient des repas froids ».

 

A 8 heures 45, l’Amiot 354 (un prototype) s’envole, escorté de huit chasseurs Bloch 152.

« Allez ! Prenons l’air nous aussi !! »

Les pilotes veillent sur lui… Pour se défendre à l’arrière, l’Amiot a, comme il a été annoté peu auparavant, mais cette fois, comme pourrait-on dire confirmé… un canon en bois... oui en bois !!! Par précaution, on veillera de ce côté.

 

Le groupe vole à 800 mètres. A cette altitude, les mitrailleuses sont inefficaces et les canons ne sont très précis qu’entre 200 et 300 mètres.

Au dessus de Bapaume, les routes paraissent très encombrées… On suit la vallée de la Somme. Voici Abbeville…. Une épaisse fumée noire s’en dégage. Le centre est en feu.

Sur la route d’Hesdin, des chars, beaucoup de chars allemands sur lesquels tire notre artillerie… Et du monde partout.

Le chef de l’escadrille qui connaît bien la région puisqu’il est natif de Berck, est sidéré de voir l’ennemi à l’approche de Boulogne. Et nous sommes le 21 mai à 9h30. L’Amiot retourne vers Doullens. Le centre de Cambrai est en feu. La défense contre avions (D.C.A) tire, on le remarque aux petits nuages qui encadrent les avions. Puis c’est Lens-Béthune-Norrent-Fontes, le terrain de Rely. Il est 10h30.

 

Ouf !! en ce qui nous concerne revenons sur terre… Ce n’est guère plus accueillant.

L’appareil du Général atterrit suivi peu après par les chasseurs. L’un des avions d’accompagnement a un ennui ; il sera contraint de se poser sur le ventre.

Le Capitaine Gasser, ordonnance du Général, revient furieux… le général, lui est calme.

« Tout à l’heure, dit-il au Commandant de l’escadrille, il nous a été précisé que le Groupe basé ici nous attendait et avait reçu l’ordre de nous ravitailler... Eh bien !!! Il est parti depuis trois jours. »

 

Sur le terrain de Rely, il ne reste qu’un soldat. Heureusement, ajoute Weygand vous avez de l’essence… moi j’ai à faire… je serai de retour dans une heure. Départ 11h30.

Sur le terrain, il ne reste plus qu’un soldat pour garder les soutes avec 20 000 litres d’essence. De plus ces soutes n’avaient aucun dispositif d’autodestruction.

 

Note d’Emile : « J’ai effectué de multiples recherches dans l’espoir d’identifier ce militaire mais, n’ai obtenu aucun résultat. »

 

A bord d’une vieille camionnette abandonnée sur la base aérienne, le généralissime s’en va à la recherche d’un téléphone.

Au deuxième village qu’il rencontre, il parvient à obtenir une communication avec le général Billotte. « Je reviendrai en fin de ce récit sur le véhicule utilisé par le général et un peu de son emploi du temps. »

Peu après le départ de Weygand du terrain de Rely, un véhicule s’y présente. Un officier du train y sort et de suite aux présents s’adresse en ces termes :

« Qu’est-ce que vous foutez encore ici ? Les fritz sont à 10 kilomètres, leurs avants- gardes foncent à 60 à l’heure !!! Où est votre Etat- Major ? lui demande le commandant de l’Escadrille. Foutez le camp… Tous partis… Je suis le dernier ».

« Avez-vous rencontré sur la route une camionnette avec un général ?? »

« Comment voulez vous que l’on reconnaisse un général dans cette pagaille ? Qui est ce général ? … Le général Weygand !!! Eh bien s’il est parti en direction d’Hazebrouck… il est pris par les Boches. Allez vous en, dis-je. Les pilotes ne vont tout de même pas partir sans le général !!!! ».

Les minutes passent. L’inquiétude grandit. On scrute le ciel de crainte qu’un stuka n’apparaisse. Où est-il donc ? Prisonnier ? Ce n’est pas impossible. Le capitaine Veniel fait chauffer les moteurs dans l’éventuel départ précipité.

Weygand est tout simplement en train de se restaurer dans une auberge proche du terrain d’aviation… Témoignage là de l’aubergiste Madame Lignot.

Je ferai le récit de cette rencontre Weygand-Lignot dans d’autres pages.

 

A 11h45, les pilotes le voient enfin revenir… avec quel soulagement. Weygand s’adresse alors au chef d’escadrille : « Capitaine, la situation est lamentable. Jamais, je n’aurai pu imaginer un pareil désordre… C’est maintenant qu’il faudrait avoir la tête froide. Or tous sont affolés. Les soutes sont tellement encombrées qu’aucun mouvement important n’est plus possible. Vous voyez ce spectacle de désordre et de panique me rappelle fâcheusement mes premiers revers de 1914 ».

Le Commandant de l’escadrille le prévient « Mon Général, un officier vient de nous avertir il y a une demi-heure que les Allemands sont à proximité et que, d’un moment à l’autre leurs avants- gardes peuvent surgir. Il faut se préparer à décoller au plus tôt. »

« Où est cet officier ? A quelle arme appartient-il ? ». « Il est du train… il m’a dit que son Etat- Major avait décroché et qu’il était le dernier… Il est parti en direction de Saint Pol !! »

Le Général déploie sa carte. Il fait le point. La situation est claire… l’ennemi va bientôt s’emparer du terrain d’aviation pour avoir une base proche des combats.

« En route, cap sur Saint Inglevert-Calais, j’espère que cette fois, on m’y attend !!! »

 

Estrée-Blanche à deux kilomètres de Rely fut occupée l’après- midi même. La formation passe à côté de Boulogne dont le port est protégé par des ballons captifs... puis atterrit sans s’en rendre compte entre les trous des bombes.

 

Weygand rejoignit à l’hôtel de ville de Calais le Général Campon chef de la Mission Française auprès de l’armée belge. Le roi Léopold l’attendait à quinze heures à la mairie d’Ypres. Il arriva avec une heure de retard en raison de l’encombrement des routes.

Le Général Gort, Commandant des Forces Expéditionnaires britanniques n’ayant pu être informé à temps (paraît-il) était représenté par un officier d’Etat- Major. Rencontre sans issue... Huit jours plus tard les Belges rendaient les armes.

 

Le mardi 21 mai, l’Escadrille était retournée au Bourget. Deux appareils de chasse ne revinrent pas ; l’un dut être détruit à Rely, l’autre avait eu à Calais une panne de démarreur, impossible de réparer, le pilote le rendit inutilisable.

 

Le Généralissime rentra à Paris par le Havre, le risque de bombardement était trop grand.

 

A Ypres, une contre- attaque a été projetée ; les Anglais partiront d’Arras et les Français se dirigeront vers Cambrai. Mais les Unités Françaises prévues pour l’offensive ont été en grande partie détruites dans la région de Valenciennes. Le Général Blanchard qui succède au Général Billotte mortellement blessé près de Bailleul au retour de Belgique, demande aux Britanniques de surseoir à l’attaque d’une journée. Lord Gort refuse. Sa tentative avec l’aide des blindés français échouera au sud d’Arras qui fut prise le 24 mai par les Allemands.

 

Weygand, Commandant en chef de l’armée française se retrouve seul sur un terrain d’aviation désert, cela est l’illustration même de la défaite de mai 1940, la pagaille au plus haut niveau.

Heureusement, l’unique soldat présent (son nom est malheureusement inconnu mais sa présence, seul sur la base restera dans les annales de l’histoire) réussit à dénicher une camionnette Ford bien fatiguée qui devait permettre de trouver une cabine téléphonique en état...

 

Puis ce fut les combats sanglants de Saint Hilaire- Cottes les 22 et 23 mai 1940.

 

 

Le terrain d’aviation de Rely 1937-1947

 

Fin de la visite du Général Weygand

 

Dans les derniers jours de l’année 2010, j’étais parvenu à fournir des renseignements, précisions, souvenirs sur la création de la base aérienne militaire de Norrent- Fontes - Rely de son point de départ le 15 août 1937 jusqu’au jour réellement historique du 21 mai 1940 se rapportant à la visite du Généralissime français Maximilien Weygand sur cette base et en pleine tourmente nationale.

Mes exposés s’étaient arrêtés à l’heure de son retour vers la capitale suivie par quelques lignes sur la situation réelle de ce coin de France avant les sanglants jours du 21 et 22 mai 1940 dans notre commune.

Les derniers paragraphes de ce récit portaient sur le départ du terrain d’aviation du Général Weygand à bord d’une camionnette à la recherche d’une cabine téléphonique en état de marche qui lui permettait de rentrer en communication avec les responsables militaires et civils du secteur d’Hazebrouck-Lens-Béthune-Arras-Saint Pol afin de connaître un peu plus parfaitement la situation des éléments français et alliés dans cette zone perturbée.

 

Revenons un instant sur les traces du général à bord de sa camionnette avec son chauffeur et son ordonnance à la recherche d’un téléphone en état de marche. Nos investigations nous ont permis d’apprendre que Weygand en cette matinée du 21 mai avait quitté la base aérienne et s’était dirigé vers le village de Rely puis vers le hameau de La Couture et s’était arrêté à l’auberge tenue par Madame Lignot. La tenancière donc Hélène Lignot nous a fait le témoignage suivant :

 

« J’étais occupée à laver du linge dans la cour quand la porte du café a été ouverte et que j’ai vu un soldat français qui s’est avancé vers moi. Je suis donc allée vers lui et ai remarqué qu’il portait des étoiles… sur sa tenue. Son visage me disait quelque chose !!! Il me semblait déjà l’avoir vu. Il m’a de suite adressé la parole en ces mots –Bonjour Madame. Je suis ici au repos des voyageurs ? Pourrait-on avoir un repas ?--- Ma réponse : C’est que je n’ai pas grand-chose !!! du lait, des œufs, des pommes de terre. C’est très bien ainsi ! Je vous quitte quelques instants… et l’officier revient en compagnie d’ un capitaine. Il s’agissait de son aide de camp... je crois.

Pendant que je prépare l’omelette, il me pose des questions sur ma famille, mon mari qui est mobilisé, mon fils de onze ans qui est à mes côtés. Qui sont ces gens qui passent sur la route ? demande-t-il … Des réfugiés, ils fuient les Allemands. Il m’a demandé si le téléphone fonctionnait. Je lui ai montré l’emplacement et je crois qu’il a eu communication. Après un certain temps de présence, je crois l’avoir identifié... Il me semble reconnaître en vous, lui dis-je... le Général Weygand. En personne même Madame ... mais qui vous a renseigné ? J’ai votre photo dans le café... elle représente la cérémonie de signature de l’Armistice de 1918 à laquelle vous assistiez. En regardant la photo encadrée et accrochée au mur, le Général m’a paru surpris et flatté d’avoir été reconnu dans notre modeste village. Toujours des dires de Madame Lignot, le repas terminé, il a déplié une carte et discuté avec son officier… Il est parti après m’avoir fait des compliments pour le repas et mon sens de l’observation. »

 

La photo dont il est question est la reproduction de celle où le Général Weygand assistait à la signature du traité de Versailles le 28 juin 1919 qui mit fin à la première guerre mondiale.

En réponse à une question personnelle posée quelques temps après, Dame Hélène Lignot m’a répondu : par peur des représailles, le cadre en question fut jeté dans un abreuvoir.

 

J’ai terminé mon premier récit sur le terrain d’aviation militaire en mentionnant en dernier ressort que le 22 et 23 mai 1940, ce furent les journées sanglantes pour notre petit village de Saint Hilaire et arrivé cette seconde fois en fin de présentation de la présence du Général Weygand au terrain d’aviation, je tiens à informer mes éventuels lecteurs que je ne reproduirai pas ici les combats de mai 40, ceci ayant été fait dans mon recueil de souvenirs présenté : « Un peu de tout sur et de mon petit village ».

 

Mais pour information plus poussée, je vais encore « parler » quelque peu du terrain, sur son aménagement et son alimentation en eau jusqu’aux abords de 1947.

 

L’alimentation en eau du terrain

 

Afin de réaliser les projets d’aménagement du terrain d’aviation de Rely, il était nécessaire aux Allemands de fournir une quantité impressionnante  d’eau aux ouvriers, maçons, bétonneurs chargés de préparer le ciment nécessaire à l’édification des hangars à avions, sans compter bien sûr les besoins courants du personnel de la base et des autres activités. La présence à une certaine époque du personnel : pilotes, mécaniciens, services courants, unités de défense et de protection sur cette base aérienne aurait été de plus de 800 âmes.

Après une tentative avortée au « Fond de Beauvois » lieu-dit sur la commune de Saint Hilaire-Cottes, l’eau fut découverte Rue Principale de notre commune, côté Norrent-Fontes, à une profondeur de huit mètres. Un forage fut rapidement entrepris que l’on poursuivit cependant jusqu’à la côte de moins de soixante dix mètres  afin d’atteindre la véritable nappe phréatique.

Grâce à une puissante pompe, il fut possible d’amener son eau par canalisation souterraine jusqu’à l’aérodrome soit à environ trois kilomètres de là, malgré une différence de niveau de soixante mètres « altitude de station de pompage : trente quatre mètres, borne de réception : quatre vingt treize mètres. »

Une performance pour l’époque !!

Le tracé de la canalisation côtoyait et côtoie toujours grosso-modo la route d’Hesdin. Les besoins en eau et en énergie augmentaient journellement, l’implantation d’une base importante nécessitait de grosses capacités d’eau devenant un besoin impératif. Tout d’abord les constructions vont exiger des milliers de mètres cubes de béton et de ciment pour poser les briques. « Un million quatre pour remplir les citernes prévues pour les incendies éventuels, pour le confort et le logement de centaines de soldats. »

Il faut citer aussi, malheureusement, l’eau déposée dans les bacs au pied de la rampe de lancement de V1 au hameau de La Couture à Rely. L’eau stockée dans ces bacs bétonnés de plus de trois mètres de long sur deux de largeur étaient employés pour le rinçage du canon de tir après chaque lancement, les produits employés à ce canon de tir étaient hautement corrosifs.

 

Bien vite donc, le Génie allemand va faire creuser le puits de Saint Hilaire puis l’eau sera amenée par canalisation sur tout le terrain. On installera, sans doute vers 1941, plusieurs bouches à eau et ce sur différentes parties du terrain : 2 vannes à Auchy au Bois, 1 sur Ligny les Aire et une face aux alvéoles de Saint Hilaire-Cottes.

 

Le réseau électrique va devoir lui aussi être renforcé. Une grosse ligne électrique existait déjà pour alimenter la mine de charbon de Ligny les Aire dont les besoins étaient importants ; on va donc faire un branchement à cette ligne pour alimenter le terrain. Les habitants de Saint Hilaire-Cottes, Lières, Rely, Auchy au Bois sont réquisitionnés ou doivent fournir des attelages, des chevaux, pour transborder les marchandises, creuser les tranchées de plusieurs kilomètres pour amener les canalisations sous pression donc, de Saint Hilare-Cottes à Rely pour commencer.

 

Il fallait amener des dizaines de citernes d’eau surtout avant que l’eau courante ne soit disponible. L’alimentation partielle a été établie dès fin 1940. Le cantonnement des militaires a engendré aussi des activités : amener des tonneaux d’eau en des lieux non desservis par l’eau courante. Des centaines d’ouvriers seront nécessaires surtout durant la phase de construction, donc de juin 1940 à juin 1941. Les ouvriers seront pour la plupart des étrangers attirés par le salaire élevé ou obligés de travailler soit par réquisition soit par nécessité ; beaucoup venant de Belgique. L’alimentation en eau courante du cantonnement des militaires a été ainsi vite entreprise.

 

Le 13 janvier 1941, il a été porté indirectement à la connaissance des habitants de Saint Hilaire-Cottes que ces travaux seraient commencés dans une quinzaine de jours du fait de l’arrivée dans le site de huit cents militaires de l’armée de l’air.

Le terrain français suite à l’expansion du site représentait déjà plus de 83 hectares répartis sur Rely et Saint Hilaire-Cottes, cette surface n’a pas tardé à être considérablement augmentée par l’occupant. Personne n’osera bien sûr protester ou exiger des indemnités, mais quatre communes Rely- Auchy au Bois-Saint Hilaire-Cottes et Ligny les Aire vont voir une partie de leur sol occupée et de plus interdite à la circulation, ce qui stoppera beaucoup toute activité libre pendant quelques années.

 

Pour Saint Hilaire-Cottes, toute la zone comprise entre le terrain et la Départementale n°94 sera occupée et de multiples constructions y seront implantées. Cela représente encore près de 35 hectares de terre cultivable. Il faut ajouter à cela la zone entourant le lieu-dit « Le Vert Dragon », le long de la Chaussée Brunehaut, zone prise à l’époque sur le territoire de la commune de Saint Hilaire-Cottes. Près de 250 hectares vont constituer le terrain allemand et ses annexes, c'est-à-dire plus de trois fois le terrain français. Il faudra ajouter aussi à cela un axe essentiel à la circulation dans le Pas-de- Calais, la Chaussée Brunehaut reliant Arras à Boulogne sur Mer.

 

Les Allemands voulaient donc implanter une base aérienne très importante. Tout n’a pas été perdu pour la commune de Saint Hilaire-Cottes, car le forage et la canalisation créés donc à partir de 1940 à 1941 sur le territoire de cette commune ont été utilisés pour l’alimentation en eau des habitants du village dès la libération.

 

Ceci étant, c’est en janvier 1947 que les communes de Rely, Auchy au Bois, Ligny les Aire, Westrehem, Saint Hilaire-Cottes décidèrent de constituer un syndicat intercommunal ayant pour objet l’exécution de travaux d’adduction et de distribution d’eau potable et l’exploitation du service ainsi créé.

 

Un second forage situé à quelques mètres de celui des Allemands fut mis en service afin de pouvoir approvisionner d’autres communes.

 

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